Comité plénier SPVQ : un exercice d’autopromotion qui fait fi d’abus policiers à l’égard de certain.es citoyen.es

La Clinique Droit de cité est un organisme de défense des droits des personnes marginalisées ou en situation d'itinérance judiciarisées. Dans la lettre ouverte suivante, elle réagit au comité plénier sur le Service de police de la Ville de Québec tenu le mercredi 2 mars.

Comité plénier SPVQ : un exercice d’autopromotion qui fait fi d’abus policiers à l’égard de certain.es citoyen.es | 3 mars 2022 | Article par Monquartier

Crédit photo: Comité plénier SPVQ du 2 mars 2022 - image extraite de la vidéo

La Clinique Droit de cité est un organisme de défense des droits des personnes marginalisées ou en situation d’itinérance judiciarisées. Dans la lettre ouverte suivante, elle réagit au comité plénier sur le Service de police de la Ville de Québec tenu le mercredi 2 mars.

La proposition d’amener devant les élus municipaux, en comité plénier, le directeur du Service de police de la Ville de Québec (SPVQ) faisait suite aux récentes interventions qui « ont suscité de vives réactions et préoccupations dans l’ensemble de la communauté »¹. Et pour cause! Les seuls cas qui ont été portés à notre connaissance, grâce au courage de personnes qui les ont rendus visibles, apparaissent comme des situations d’abus sinon de violence policière.

Évidemment, ces cas, du fait entre autres qu’ils aient été largement médiatisés et qu’ils aient suscité de l’indignation au sein de la population, ont obligé les décideurs à réagir, par exemple en demandant que des enquêtes soient menées.

De l’indignation à la crise de confiance

Bref, la Ville de Québec se trouve touchée par une crise de confiance envers son service de police. La réponse habituelle des institutions (politique et policière) à ce genre de crise est de vouloir rapidement « rétablir le lien de confiance entre la police et la population ». Cette confiance est fragile. Et elle apparait comme étant une donnée bien précieuse pour certains acteurs, la police en premier lieu.

Mais, comme l’a démontré l’exercice du comité plénier de la Ville de Québec, à vouloir tant éviter à la police de devoir gérer une crise qui origine de ses propres pratiques et qui a une incidence sur son organisation, en tentant d’étouffer ou de minimiser les causes bien tangibles de cette « crise » (violence, abus, etc.), n’en vient-t-on pas à passer sous silence les réels besoins de ces personnes qui ont perdu confiance en la police à la suite de situation d’abus ou de violence?

Ces personnes s’attendent à ce que de réels changements soient opérés au sein du Service de police, pour espérer des pratiques plus justes, équilibrées et surtout exemptes de violence. L’indignation mérite considération.

On se serait donc attendu lors de ce comité plénier, et dans un tel contexte de crise de confiance envers la police, à ce que les membres du conseil municipal soulèvent des questions sur les interventions et les pratiques de la police dans ce qu’elles ont de problématique, et non pas en ce qu’elles ont d’idéal. En fin de compte, on aura surtout eu droit à un bel exercice d’autopromotion du Service de police de la Ville de Québec…

Déception devant une police incapable de reconnaître ses torts et des élu.es qui ne représentent pas tous les citoyens et toutes les citoyennes.

En tant qu’organisme qui accompagne et soutient dans leurs démarches des citoyens et citoyennes qui ont vu leurs droits être bafoués lors d’interventions policières, nous trouvons plus que décevant que le SPVQ n’ait pu reconnaître certains torts, mais qu’en plus la majorité des élu.es municipaux n’aient pas su assumer pleinement leur rôle de représentant.es de tous les citoyens et toutes les citoyennes, en adressant par exemple des questions qui touchent plus directement les problèmes de discrimination, de profilage – social et racial – et de violence au sein du service de police.

Une fois que le directeur du SPVQ a rappelé, en début de rencontre, ce fameux taux d’appréciation dans la population à l’égard de son service, comme pour délégitimer toute éventuelle remise en question de celui-ci, on aurait espéré un peu plus de considération de la part de nos élu.es envers ces personnes qui, quant à elles, perdent confiance en la police à la suite d’interventions abusives voire violentes.

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En début de rencontre, on s’est bien gardé de rappeler que l’exercice ne relevait pas d’une « commission d’enquête ». Encore aurait-on pu quand même poser la question de l’encadrement du travail des policiers de manière générale, comme cela était prévu dans l’annonce du comité plénier. On a bien senti le malaise et le désintérêt du directeur du service de police pour cet aspect de son travail. Il semble être pour lui une charge de trop, plus ou moins justifiée, si l’on s’en tient à son commentaire à l’effet que « n’importe qui peut porter plainte en déontologie policière, même la personne dans son fauteuil à Montréal qui voit des vidéos… ».

Les problèmes de la police ou les problèmes vécus avec la police?

Et si enfin, par sa présentation, le directeur du SPVQ espère nous avoir rassuré quant aux pratiques d’encadrement du travail des policiers et policières, rien n’est moins sûr. On a appris par exemple que la démarche entreprise à la va-vite au sein de son organisation tient en un plan d’action de quatre objectifs qui ne répondent en rien à la problématique d’abus policiers, mais visent plutôt à promouvoir l’image d’une police plus « moderne », bref davantage en mesure de répondre aux « nouvelles réalités ».

Cela nous rappelle d’ailleurs que questionner un directeur de police sur le travail de la police, et espérer qu’il se remette en question pour espérer de réels changements dans les interventions et pratiques de ses agents et agentes, c’est peut-être devoir conclure l’exercice en restant sur son appétit.

Les problèmes de la police ne sont pas les problèmes vécus avec la police. Faudrait peut-être le rappeler au directeur de police qui, lors du comité plénier, semblait surtout préoccupé par la problématique de santé mentale parce que cela gruge beaucoup trop de temps d’intervention dans le travail de ses agents et agentes. Rappelons-lui, quand même, que certaines personnes en crise qui appellent à l’aide vont trouver pour réponse une intervention policière violente, sinon un « ticket » de 150 $ plus les frais. Mais qui sait, peut-être cela fera-t-il l’objet d’un prochain comité plénier?

¹ Selon l’avis de proposition CV-2021-1161 déposé par le conseiller Claude Villeneuve lors de la séance du conseil municipal tenue le 6 décembre 2021.

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