Citoyenneté numérique : un vox pop hyperproche

Dans le cadre de la 17e Semaine éducation médias d’Habilo Médias, ce mercredi 26 octobre 2022 marque la première Journée de la citoyenneté numérique. Pour un média d’information web hyperlocal, témoin de proche des habitudes numériques de son voisinage, c’est un sujet de grand intérêt. Quel est le plus grand défi en la matière? Que faudrait-il pour le relever? D'autres témoins des pratiques numériques de nos voisin.e.s nous répondent.

Citoyenneté numérique : un vox pop hyperproche | 26 octobre 2022 | Article par Suzie Genest

Crédit photo: Tim Gouw - Pexels

Dans le cadre de la 17e Semaine éducation médias d’Habilo Médias, ce mercredi 26 octobre 2022 marque la première Journée de la citoyenneté numérique. Pour un média d’information web hyperlocal, témoin de proche des habitudes numériques de son voisinage, c’est un sujet de grand intérêt. Quel est le plus grand défi en la matière? Que faudrait-il pour le relever? D’autres témoins des pratiques numériques de nos voisin.e.s nous répondent.

« La citoyenneté non numérique est tout aussi problématique, mais la citoyenneté numérique présuppose que la majorité maîtrise suffisamment les outils numériques pour les utiliser à des fins démocratiques, notamment. Mais juste aussi la base pour utiliser les plateformes d’interactions avec les institutions/ organismes, etc. », résume Nadine Davignon, résidente du quartier Saint-Roch et mère d’adolescent.e.s. Elle travaille comme chargée de projets éducatifs au Musée de la civilisation.

Avant toute chose, il faut « que l’on constate la fracture présente actuellement », souligne-t-elle.

Jeune mère de famille du quartier Saint-Sauveur, Claire Dumoulin est agente de développement culturel numérique. Elle identifie deux grands défis :

« La littératie numérique pour tous et aussi la protection des données des citoyens. Des sites paragouvernementaux ou même paramunicipaux, comme les plateformes d’inscriptions aux loisirs… Bref, des sites qui présentent de grosses failles informatiques, comme La place 0-5, c’est bien fâcheux… »

L’éducation, l’accompagnement, des ateliers pour tous types de publics font partie de la solution, poursuit-elle. De même, il faut des exigences et des subventions accrues pour le développement web de sites parapublics sécurisés.

Nadine Davignon pense également à l’accès gratuit « aux réseaux et aux équipements » et à la « conscientisation des décideurs, développeurs et donneurs de contrats ».

Les fractures ne sont pas que générationnelles

« Un défi serait de mettre une base commune en connaissance numérique pour tous », avance Charles Bernadet, qui enseigne au Collège Bart. Il note que les jeunes ne sont pas tous naturellement à l’aise avec la technologie, quoi qu’on en dise.

« Je vois comme enseignant au collégial beaucoup de jeunes qui ont toujours utilisé des téléphones intelligents ou des tablettes, mais ont une difficulté à comprendre la gestion des fichiers, le concept d’emplacement local, réseau, nuagique. Il y a une fracture numérique qui n’est pas nécessairement générationnelle.

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La solution peut être dans l’éducation primaire et secondaire, mais je trouve qu’ils en ont beaucoup sur les bras. Simplement posséder un ordinateur portable ou une tour de type PC et l’utiliser tôt permettrait peut-être de se familiariser avec le fonctionnement et les concepts de base. »

Citoyenneté numérique et participation publique

Ancien directeur de ZAP Québec, Dave G. Pelletier travaille aujourd’hui au service de l’Interaction citoyenne de la Ville de Québec. Son parcours alimente sa réflexion personnelle.

Lors d’une consultation, d’un atelier de cocréation, « un geste en salle n’est pas parfaitement reproductible » en ligne, observe-t-il. Il faut « choisir la bonne activité pour telle démarche en fonction des parties prenantes », des capacités et des préférences des citoyen.ne.s participant.e.s. Planifier les processus de participation publique en mode hybride demande « de la prudence et de la minutie ».

Artiste multidisciplinaire actuellement en recherches doctorales, Marie-Hélène Doré voudrait « intéresser le citoyen ordinaire aux données ouvertes de la Ville ». « Il me semble qu’il y a un fossé immense entre ceux qui sont doués pour le numérique et ceux qui ne le sont pas. » Certains événements peuvent aider à se familiariser avec les données ouvertes, note-t-elle.

« Par exemple les marathons de programmation (hackathons), ils font en sorte qu’on parle des données ouvertes. Aussi, n’importe qui peut se pointer sans préavis et y participer… Mais c’est une compétition, il faut performer. »

Pas diabolique, le numérique

En somme, dit Nellie Brière, consultante et formatrice en communication numérique et réseaux sociaux, le plus grand défi est de « développer une littératie numérique suffisante chez les citoyens et les dirigeants pour prendre des décisions éclairées ».

Professeur titulaire au département des sciences géomatiques à l’Université Laval, Stéphane Roche, renchérit : « parce que pas de citoyenneté exprimée sans participation sociale, et aucune participation possible lorsque le média / interface numérique est opaque ».

« Il faudrait des investissements pour proposer plus de ressources à ce sujet et plus de budget en éducation », résume Nellie Brière, qui vit dans Limoilou depuis 2020.

« Repenser complètement une éducation à la culture numérique tout au long de la vie, à géométrie variable (de la garderie au CHSLD), parce que sans inclusion, pas de citoyenneté active… », ajoute Stéphane Roche, un habitué de Montcalm-Saint-Sacrement.

En outre, souligne Mme Brière, il faut « contrer la panique morale » qui nuit au développement de la litératie des citoyens et des dirigeants. Jean-Sébastien Tremblay, développeur lead chez De Marque et nouveau père de famille de Saint-Roch, la rejoint :

« Sur le plan social : Éducation, Éducation, Éducation, pour que les gens comprennent que l’identité numérique, c’est pas le yâble incarné et que ça donnera pas plus de données au gouvernement. »

Il plaide aussi pour une identité numérique, citant des frustrations techniques du quotidien.

« J’ai lancé un cri de colère intérieur en recevant le NAS de ma fille cette semaine. […] On ne peut plus utiliser ClicSéqur pour nos rendez-vous de vaccin; quand on perd nos accès Google ou Facebook, aucun recours. »

Cofondateur des agences Réverbère et Heya, Charlie Fernandez pense aux responsabilités qui incombent à son milieu. Comme pour la citoyenneté « tout court », il a un rôle assumer pour le développement de la citoyenneté numérique.

« Il faut qu’il y ait une prise de conscience des acteurs économiques que sont les entreprises. On est des acteurs citoyens. Le problème, c’est que quand on fait quelque chose de philanthrope en tant qu’entreprise, c’est mal vu. J’ai des compétiteurs qui ont dit qu’on n’était pas sérieux parce qu’on offrait de la formation gratuite à des petites entreprises impactées par la pandémie. »

HabiloMédias est un organisme sans but lucratif qui œuvre pour l’éducation aux médias et la littératie numérique. On retrouve sur son site une page consacrée à la Journée de citoyenneté numérique. On peut retracer les différents contenus diffusés sur le sujet en utilisant le mot-clic #JourneeCitoyenneNumerique.

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