La famille Monier-Perrault, autour de deux grands magasins de Saint-Roch (1)

À Noël, on en profite pour revoir nos amis proches et nos familles. Anne-France Monier, la mère de mes amis d’enfance, est devenue une amie personnelle aujourd’hui. Je m’intéressais depuis quelque temps aux grands magasins dans Saint-Roch et je lui en ai parlé, juste comme ça... C’est alors qu'elle m’a révélé l’histoire de sa famille, qui gravite autour des magasins Pollack et Syndicat de Québec.

St. Joseph Street - rue Saint-Joseph vers 1900 - carte postale, domaine public, BAnQ.
rue Saint-Joseph vers 1900 – carte postale, domaine public, BAnQ.

À Noël, on en profite pour revoir nos amis proches et nos familles. Anne-France Monier, la mère de mes amis d’enfance, est devenue une amie personnelle aujourd’hui. Je m’intéressais depuis quelque temps aux grands magasins dans Saint-Roch et je lui en ai parlé, juste comme ça… C’est alors qu’elle m’a révélé l’histoire de sa famille, qui gravite autour des magasins Pollack et Syndicat de Québec.

Anne-France est allée chercher une vieille valise brune dans son sous-sol. La valise était pleine de photos prises au Syndicat de Québec. Les Pollack, Paquet, Laliberté et autres ont fait la belle époque de la rue Saint-Joseph. L’histoire de la famille de madame Monier, c’est trois générations qui ont travaillé dans ces grands magasins.

Henri Perrault dans son uniforme de l'armée américaine.Maurice Pollack et son bras droit, Henri Perrault

Le grand-père de madame Monier s’appelle Henri Perrault. Vers la fin du 19e siècle, il part en affaires avec son frère mais fait faillite. L’entrepreneur se retrousse les manches et décide d’offrir un service de traverse entre Saint-Pierre-les-Bécquets et Saint-Anne-de-la-Pérade, mais ça ne marche pas non plus.

Il s’enrôle dans l’armée américaine et devient le secrétaire d’un général lors de la guerre hispano-américaine à Cuba. À son retour de Cuba, il a la bonne fortune de rencontrer Cordélia Lemay, qui habite Deschaillons. Anne-France Monier raconte :

Mon grand-père ne prenait pas de carriole pour la fréquenter; lui, il se déplaçait en cavalier. Ma grand-mère m’avait expliqué une expression du temps : lorsque ça faisait trois fois que le cavalier attachait son cheval sur la rampe de la maison d’une jeune fille, il fallait lui donner une réponse. »

Cordélia LemayMademoiselle Lemay dit oui et après un petit exil à Montréal, le couple vient s’établir à Québec où Henri rencontre Maurice Pollack. Monsieur Pollack – d’origine juive ukrainienne – engage Henri parce qu’il a besoin d’un Canadien français catholique pour l’aider dans ses relations avec le milieu. Henri paraît bien, parle bien et surtout il est  bilingue, ce qui est un atout majeur à l’époque pour les commandes.

Monsieur Perrault devient en quelque sorte le bras droit et l’homme à tout faire pour les magasins Pollack. Les deux hommes deviennent bons amis. Par exemple, monsieur Pollack fait livrer du poisson les vendredis après-midi et s’attable avec la famille Perrault pour souper avant de retourner travailler. La résidence d’Henri et Cordélia est alors située sur Arago Est, à proximité du magasin.

Mais tout n’est pas toujours rose entre les deux amis. Parfois, Henri part subitement du travail dans des colères noires. Monsieur Pollack appelle alors Cordélia, qui demande : « Il s’est choqué encore ? ». Maurice répond, désespéré : « Madame Perrault… Madame Perrault… dites-y d’revenir. » Anne-France se souvient : « Il faisait souvent choquer ma grand-mère aussi. Il disait : “À Cuba, il y a du bon rhum et des femmes amoureuses.” »

Maurice Pollack - photo originale : Fondation Maurice-PollackMonsieur Pollack devient très riche grâce à ses magasins. Il a un verger à Sainte-Foy, qui s’appelle le verger Pollack et où le public peut aller ramasser des pommes. Dans sa vieillesse, il réside au Château Frontenac et les deux hommes s’y rencontrent à l’occasion. Monsieur Perrault amène parfois la petite Anne-France et lui dit : « Qu’est-ce qu’il boit, Grand-papa ? » Et elle doit répondre : « Du thé ». Comme cadeau de retraite, il donne à Henri un terrain dans Sainte-Foy, qui est encore peu développé à l’époque. Plus tard, le fils de mMonsieur Pollack construira le pavillon de l’Université Laval qui porte son nom.

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Le prochain texte de cette trilogie, ce jeudi 29 janvier, portera sur le père d’Anne-France Monier, Georges Monier, qui était chef de rayon au Syndicat de Québec. J’ai pu récupérer plusieurs photos de l’intérieur du Syndicat de Québec – surtout du rayon des cosmétiques – que je vous présenterai.En attendant, voici une photo des employés du magasin lors d’une fête. Je me demande si ce sont les employés de Paquet ou du Syndicat… En reconnaissez-vous ?Employés du Syndicat de Québec

À l’exception de celles dont la légende cite une autre source, les photos de cet article proviennent des archives personnelles d’Anne-France Monier. Avec sa permission, elles ont été recapturées, recadrées ou autrement modifiées par Dominic Champagne. Merci aux photographes du Syndicat de Québec, dont Alarie, Marc Hardy et Paul Christin.

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